Adaptation du langage adulte pour stimuler l’acquisition chez l’enfant
À partir des premiers contacts, dans ses interactions à deux qui se créent et se développent, le bébé va vite reconnaître les adultes comme partenaires privilégiés. Ils vont l’aider dans son développement, sa compréhension du monde et l’expression de sa personnalité. C’est vrai tout d’abord de sa mère. Mais ses partenaires vont ensuite se diversifier. Autres adultes, de la famille ou non (professionnels des lieux d’accueil de la petite enfance) et autres enfants. Les bébés vont ainsi trouver des conditions plus ou moins diversifiées, selon les cas, pour expérimenter des formes de communication variées et développer leur maîtrise de la langue. Dans ces interactions, les adultes développent des modalités particulières d’adaptation du langage et des procédés spécifiques d’enseignement, qui vont aider les enfants dans leurs acquisitions.
Certes, des caractéristiques générales peuvent être dégagées. Mais il existe aussi des différences interindividuelles dans la manière de parler aux enfants, selon les cultures, les milieux sociaux, et le style de chacun. Quelles en sont les incidences sur le développement du langage ? En général, les adultes ne parlent pas aux jeunes enfants comme aux autres personnes. Ils utilisent différents procédés pour rendre leur langage plus facilement compréhensible pour attirer l’attention du tout-petit et l’inviter à communiquer. Et peut-être, pour lui apprendre à parler.
Caractéristiques de l’adaptation du langage adulte et leurs effets
L’adaptation touche de multiples aspects du langage.
- Du point de vue prosodique, on constate avec les tout-petits une élévation de la hauteur tonale, des pauses plus longues, un rythme d’élocution ralenti. Ces caractéristiques permettent de signifier au bébé que c’est à lui qu’on s’adresse. Et lui facilitent la segmentation et le traitement des énoncés.
- Dans les aspects sémantiques, les recherches sur les interactions mère-enfant ont souligné la faible diversité lexicale. Le vocabulaire est limité, avec une surreprésentation des mots faciles à prononcer. On relève de nombreux termes à référence concrète, et une utilisation préférentielle des relations sémantiques les plus fréquentes dans le langage des enfants. adaptation du langage
- Du point de vue syntaxique, les mères ajustent la longueur moyenne de leurs énoncés à un niveau légèrement supérieur. Les énoncés sont syntaxiquement simples, et en général bien formés. Par exemple : « Donne à maman ! ».
- La fonction des énoncés présente aussi de nombreuses spécificités. Les mères adressent beaucoup de requêtes d’action et d’information. Elles font aussi de nombreuses descriptions. Leur discours est très redondant. On peut parler d’une expansion du discours enfantin.
Quels sont les effets de ces adaptations? Malgré de nombreuses tentatives, on a rarement mis en évidence des effets directs sur le langage des enfants de tel ou tel procédé particulier d’adaptation. Hormis pour les expansions, le taux d’expansions maternelles est corrélé avec différentes mesures du développement langagier des enfants dans les mois qui suivent. Fournir des expansions aux enfants leur assure qu’ils ont été écoutés et entendus, ce qui les encourage à poursuivre l’interaction. Sans doute, plus que tel ou tel procédé de simplification, c’est surtout le contexte de l’interaction qui doit être considéré.
Tous les parents adaptent-ils leur langage ?
Les études sur l’adaptation du langage des pères ont montré qu’ils utilisent à peu près les mêmes procédés que les mères. La similitude d’autant plus élevée qu’ils consacrent du temps à leur enfant. Lorsque des différences sont observées, elles témoignent d’une complexité un peu plus grande du langage paternel. Celui-ci jouerait un rôle de pont vers l’extérieur. Une sorte d’intermédiaire entre le langage maternel et celui utilisé en général par les adultes.
Les comparaisons interculturelles ont relevé des procédés similaires dans de nombreuses langues: anglais, américain, japonais, arabe, espagnol, italien, chinois. Élévation de la hauteur tonale, faible longueur moyenne des énoncés, pauses plus longues se retrouvent ainsi d’une langue à l’autre, avec quelques variations d’amplitude. Est-ce à dire que cette adaptation est universelle de la part des parents ? Certains chercheurs pensent que non. Ils citent l’exemple de communautés indiennes dans lesquelles les mères murmurent à leur enfant plutôt que d’exagérer la prosodie. Mais n’est-ce pas une autre façon d’attirer l’attention de l’enfant ? En fait, les enseignants savent utiliser ce procédé pour susciter l’attention d’une classe ou d’un amphi un peu dissipés !
Il apparaît donc, à quelques réserves près, que les enfants bénéficient d‘un environnement langagier adapté, susceptible de les aider dans l’analyse et la compréhension de la langue maternelle. Mais ceci ne signifie pas que tous les parents s’adressent de la même manière à leur enfant. adaptation du langage
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