Apprentissage de la lecture au CP
La lecture au CP : un défi de taille
Enjeu fondamental du cycle 2, l’apprentissage de la lecture développe la confiance en soi et la maturité des élèves. Couplé à l’enseignement de l’écriture, il accroît aussi l’autonomie et la curiosité. Le choix d’une méthode adéquate, adaptée à chaque enfant, se révèle crucial.
Comment un enfant apprend-il à lire ?
L’apprentissage de la lecture au CP repose sur un processus de cognition complexe. Le comprendre permet d’envisager l’enseignement dans sa globalité. Un choix de pédagogie éclairé repose sur une connaissance précise du sujet.
De l’oral à l’écrit
Les études en neurologie démontrent que l’enfant développe très tôt l’aire du langage. Dédiée à la langue parlée, elle assimile déjà la syntaxe et les constructions de concepts utilisées lors de l’expression orale. L’enseignement de la lecture, préparé en amont ou non à la maternelle, consiste à transposer cette aire du langage oral vers l’écrit à travers la vision.
De la lettre au mot
L’apprentissage de la lecture advient suite à un processus fastidieux d’acquisition d’une conscience linguistique. Elle permet un décodage graphophonologique. L’enfant, dans un premier temps, reconnaît les lettres de l’alphabet et les syllabes formées par celles-là. Il les associe ensuite à des phonèmes, déjà connus par son cerveau. Étape ultime : l’élève parvient instinctivement à associer les graphènes au sens des mots, puis des phrases.
De gauche à droite
Comprendre la retranscription de la temporalité propre à l’oral représente un autre point crucial de l’apprentissage de la lecture. À l’oral, une succession de phonèmes qui se suivent forme une idée connue. Dans l’esprit de l’enfant, un vocable possède ainsi une temporalité. Le passage de la gauche vers la droite dans un texte transpose ce défilement du temps.
Comment préparer l’apprentissage de la lecture en CP ?
Pour un professeur, le pouvoir demeure limité à l’enceinte de l’établissement. Il ne se trouve pas toujours en mesure d’établir un environnement favorable à l’extérieur de l’école. Cependant, un certain nombre d’éléments permet de surmonter les défis de l’enseignement.
Dès la maternelle
Depuis des années, les recherches suggèrent à l’enseignement de débuter l’association des lettres et des sons dès la maternelle. À ce titre, les pédagogues proposent de lire régulièrement des histoires aux enfants pour enrichir leur vocabulaire. De même, apprendre par le jeu des éléments de l’écrit – lettre, mot-outil, nom, etc. – assure à l’élève d’arriver en cycle 2 muni d’un bagage essentiel accélérant l’acquisition de la lecture.
Anticiper les difficultés
Certains élèves souffrent de difficultés pour apprendre à lire. Les maladies et les handicaps créent des retards et des obstacles plus durs à affronter. Un professeur se doit néanmoins de ne pas abandonner.
Les méta-analyses sur le sujet prouvent que la plasticité du cerveau garantit à l’enfant une capacité immanquable à trouver une astuce, une stratégie cognitive. En conséquence, en anticipant les difficultés de ses élèves, un professeur peut adapter ses méthodes à leurs besoins caractéristiques, à leurs façons de comprendre et d’apprendre.
Comment choisir la pédagogie à employer ?
En France, il existe aujourd’hui principalement quatre méthodologies employées par le corps enseignant. Si toutes ont fait leurs preuves, chacune s’ajuste plus à certains élèves. Un professeur diversifie son panel méthodologique et s’adapte toujours aux besoins spécifiques de sa classe.
La méthode syllabique
Très en vogue au début du XXe siècle, la méthode syllabique connait ses heures de gloiremont de 1920 à 1950. Elle consiste essentiellement à associer les syllabes écrites aux phonèmes oraux. Les enfants apprennent alors à jouer avec les briques primaires de notre langage.
La pédagogie développée par les époux Boscher en 1906 offre de nombreux avantages :
- un esprit de compréhension développé par un apprentissage réflexif ;
- une autonomie accrue par la maîtrise des outils nécessaires au déchiffrage des mots ;
- une accessibilité dès l’âge de 3 ans, avenante pour l’enfant.
Elle tombe néanmoins en disgrâce dans les années 60, souffrant de sa lenteur d’apprentissage. La mise en place des automatismes nécessaires à la reconnaissance des éléments de vocabulaire complexes dure généralement de 2 à 3 ans.
La méthode globale
Conçue dès le début du XXe siècle par un pédagogue belge, la méthode globale ne connait le succès en France qu’à partir des années 60. Il s’agit d’un apprentissage idéo-visuel. L’assimilation du mot s’opère par la reconnaissance physique d’un ensemble de caractères associé à une idée. La graphie du vocable n’est alors plus aux yeux de l’enfant une suite de graphènes, mais un idéogramme.
L’idée d’Ovide Decroly se fonde sur un principe simple. Selon lui, les enfants n’analysent pas : ils perçoivent globalement uniquement. La décomposition du mot en graphènes s’avère donc inutile. On observe grâce à cette méthode :
- l’acquisition précoce d’un vocabulaire lu par les enfants dès la maternelle, ce qui se révèle très motivant pour l’élève ;
- une lecture fluide des mots visualisés dans leur globalité.
Ce type de pédagogie prive néanmoins les écoliers de leur autonomie. Seul le vocabulaire écrit maîtrisé est connu. Tous les autres mots demeurent illisibles. De nombreux parents l’accusent de créer l’échec scolaire. Après de nombreuses polémiques dans les années 80, la méthode globale est abandonnée à son tour.
Cette méthodologie comporte pourtant des avantages non négligeables pour les enfants souffrant d’un trouble du déchiffrement.
La méthode phonémique
Inventée par la pédagogue illustre du début du XXe siècle, Maria Montessori, la méthode phonémique postule que l’apprentissage de l’écriture précède celui de la lecture. Dans ce cas, l’enfant apprend d’abord à orthographier le mot, à le décomposer en graphènes et à l’inscrire sur le papier avant de le lire. Il retranscrit de lui-même le son écrit, l’analysant par le même coup.
La méthode phonémique n’utilise pas la syllabe. Elle s’intéresse aux phonèmes propres aux lettres. L’enfant recompose le mot quand il lit successivement chaque graphène.
Ce jeu de devinette n’est pas adapté à tous les élèves. Ceux qui profitent d’un environnement favorable se développent rapidement avec une telle méthode et en bénéficient au quotidien. Mais ceux qui se heurtent à des difficultés importantes peuvent vite se retrouver sur le banc de touche. Les efforts de concentration nécessaires au bon fonctionnement de cette méthode sont importants.
Les méthodes mixtes
Mises en avant dès les années 80 par les psychologues cognitivistes, elles se basent sur les stratégies mises en place par les enfants pour adapter la méthode des enseignants. On remarque ainsi plusieurs acquisitions clefs chez les écoliers :
- les analogies entre le son des syllabes et le son des mots ;
- la reconnaissance automatique des mots familiers vus dans leur quotidien ;
- la formation des graphènes écrits qui augmente la compréhension à la lecture.
Les pédagogues s’inspirent des trois grands courants existants. La combinaison de ces méthodes absorbe les avantages des trois visions. Elle incorpore aussi bien l’apprentissage par cœur, fluidifiant la lecture, la décomposition syllabique, assurant l’autonomie, que le lien à l’écrit, accélérant le décodage graphophonologique.
Les méthodes mixtes souffrent néanmoins de ses avantages. Le professeur doit être davantage à l’écoute de ses élèves pendant l’ensemble de l’apprentissage. L’usage par cœur des mots-outils ne convient pas à tous. Le déchiffrement pose mécaniquement problème à certains. Et comme pour la méthode phonémique, les écarts entre les enfants peuvent dramatiquement se creuser.
Enseigner la lecture au quotidien
En tant que professeur, il s’avère essentiel d’adapter votre pédagogie au cas par cas pour que tous se développent dans les meilleures conditions possibles. Chaque élève possède ses propres particularités et chaque méthode a ses avantages et ses inconvénients. Identifiez les difficultés et les identités : c’est l’une des clefs les plus importantes d’un bon enseignement.