Comment les enfants discrets peuvent progresser
Si l’on considère que l’on peut ou doit aider chaque élève à participer aux échanges en classe pour améliorer son avenir scolaire, alors on choisit d’intervenir sans doute auprès des enfants discrets ou les plus silencieux. Mais aussi et, en conséquence, cela doit être fait sur les leaders d’une façon ou une autre.
Comprendre ce qui provoque leur silence
Traditionnellement, l’enseignant considère que les enfants discrets sont des enfants timides qui finiront bien par parler un jour en classe. S’il ne se donne pas le droit d’intervenir au nom du respect de la personne, il prend le risque de ne pas permettre à l’enfant d’acquérir la moindre compétence.
Dans un premier temps, il s’agit de comprendre ce qui provoque le silence. L’attitude de participation ou de retrait par rapport aux échanges en classe s’installe dès les petites sections et persiste ensuite durant la scolarité. Les stratégies des parleurs sont déjà bien maîtrisées dans ces sections. Ils savent, sans toujours demander la parole, attirer sur eux l’attention de l’enseignant, se faire entendre. Il existe des rapports de force dès l’âge le plus tendre et ce sont déjà les plus entreprenants qui l’emportent au détriment des plus réservés. Il s’agit donc de faire en sorte que ces élèves ne monopolisent pas la parole. La parole fragile des élèves plus discrets doit trouver place dans la discussion collective. Cela se construit lentement. La sécurité est une condition pour permettre de progresser. Le projet doit aider à la motivation.
Et puis, l’enfant ne comprend pas forcément d’emblée la tâche langagière, la participation que l’enseignant attend de lui. Un travail spécifique au cours duquel l’intervention verbale de l’enseignant jouera son rôle pour permettre aux enfants discrets de comprendre l’implicite des situations. Enfin, les discours peuvent ne pas être maîtrises d’emblée si la tâche demande des actes langagiers complexes qui comportent des discours difficiles.
Le silence a des causes et il s’agit de les identifier. Ce sont des composantes de la compétence langagière qui font obstacle pour l’élève. Il s’agit de les reconnaître pour agir et construire des situations didactiques qui permettront aux élèves de franchir ces obstacles et donc de progresser.
Les pratiques courantes
Dans les pratiques courantes à l’école primaire, les enseignants jugent parfois que l’interaction langagière individuelle est le moyen privilégié; sinon exclusif, d’intervention auprès des enfants discrets pour leur permettre de progresser. D’autres mettent en place des groupes réduits d’enfants pour favoriser la communication, en considérant que parler suffit d’une certaine façon pour apprendre à parler. Parfois l’enseignant est présent dans le groupe et interagit avec les élèves pour lancer un thème; réguler la parole, apporter son vocabulaire et sa syntaxe dans la conversation. A l’inverse, certains considèrent, qu’en maternelle, parler en groupe ne permet pas d’apprendre à parler.
A l’école élémentaire, en général la compétence langagière orale n’est pas travaillée. Lorsqu’une séance de travail sur l’oral est mise en place, c’est autour du vocabulaire. Certes des situations où les élèves parlent existent. Ils discutent, donnent leur avis mais surtout ils répondent aux questions que pose l’enseignant, donnent des réponses. Les énoncés sont brefs, un mot, une phrase. L’initiative appartient à l’enseignant, qui introduit le thème, régule et clôt les échanges. Il reformule ou corrige les propos des élèves. Quand un travail est effectué sur le vocabulaire ou par la discussion, c’est dans l’espoir de voir ce travail réinvesti dans les tâches d’écriture. Espoir souvent déçu.
Intervention nécessaire pour les enfants discrets
La compétence langagière orale se travaille grâce aux situations vécues dans la classe. Un grand nombre d’entre elles peuvent être l’occasion du travail sur l’oral. Certes, il ne s’agit pas d’oublier les objectifs propres aux diverses disciplines. Mais on peut concilier travail sur l’oral et construction de savoirs disciplinaires. Certes, l’enfant arrive en maternelle avec son langage, sa culture, ses représentations. Toutefois, certains ont des difficultés avec le langage. Apprendre à s’exprimer, à écouter l’autre, réfléchir sur sa parole, celle des autres; aimer parler et agir sur l’autre par ses mots; c’est devenir une personne sociale en même temps qu’un élève qui commence à maîtriser une compétence langagière orale dont il va poursuivre la construction à l’école élémentaire.
En effet, les situations sont à construire, à inventer ou à revisiter, pour permettre aux apprentissages relatifs à l’oral de se faire; et à la réflexion sur le langage mise en place de se poursuivre. Toutes les situations à utiliser pour permettre, soit de construire une parole collective sous forme de projet; soit une parole individuelle que l’on aura laissé s’exprimer au-delà du mot ou de la phrase, en un discours construit.
Le travail en atelier ou en petit groupe permet aussi d’apprendre à discipliner sa parole pour écouter la parole de l’autre, pour argumenter, expliquer. L’enseignant se présente à certains moments pour aider à la construction de cette parole partagée. À d’autres moments, son absence permet de construire l’autonomie dans sa discussion verbale.
Enfin, la parole en face à face, celle où l’enseignant s’adresse à l’un des enfants discrets, a aussi sa place dans le dispositif didactique. Les reformulations personnalisées, les questions qui permettent d’aller plus loin dans la construction d’un discours complexe, l’écoute attentive d’une parole personnelle sont des éléments importants pour la construction de la parole.
Un commentaire