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Le dispositif de formation entre éducation et instruction

Certainement, il paraît plus efficace, y compris dans la volonté de promouvoir le changement; de considérer l’enseignant comme une des figures du formateur; et l’enseignement comme une forme particulière de la formation; cadrée dans une institution précise et dont les actes seront influencés par cette institution. En revanche, il y a bien une dichotomie entre l’instruction qui vise en priorité à faire acquérir le savoir; et l’éducation dépassant l’inculcation du savoir pour viser le développement maximum de la personnalité de chacun; et au plus haut niveau de ses possibilités dans une école qui ne serait pas seulement celle du savoir. Mais aussi celle du savoir-faire utilisable, mobilisable pour l’action, sans lequel le savoir n’est rien; pour aboutir enfin à ce qu’on appelle maintenant le savoir-être comme couronnement du dispositif de formation humaine.

Cette opposition n’est pas une simple affaire de valeurs qu’on pourrait laisser au choix du formateur. Elle désigne deux projets de formation qui sont à la fois antagonistes et complémentaires. Les orientations officielles enjoignent à l’enseignant de réaliser le double projet d’instruire et d’éduquer. C’est bien l’une des données qui font de son métier une aventure. Or aujourd’hui, on forme, on instruit, on enseigne, on n’éduque plus réellement. Car dans notre société, les valeurs sont hiérarchisées dans le sens d’un axe privilégié au sommet duquel l’intellectuel prédomine. L’éducation s’y trouve rétrécie aux dimensions de l’instruction.

la formation

Le dispositif de formation, une affaire de sujets

Le sujet se définit dans le champ d’action de la formation. Il n’est ni à réduire au mental, à une cognition computationnelle; ni à confondre avec la totalité de la personnalité de celui qu’on forme. Parler d’élève, c’est réduire le sujet à un rôle institutionnel. Parler d’enfant, c’est encastrer le sujet dans un programme de développement confondu avec le lien parental. Et parler de personne, c’est déborder le sujet d’un dispositif de formation dans une métaphysique.

En fait, la notion de sujet permet de passer de la technique de transmission de savoirs; (qui réduit l’autre à un élève ou à un enfant); à l’appropriation des situations de communication de ces savoirs. C’est-à-dire que les rapports entre les contenus et la présentation ( les mises en situation, la mise en circulation) de ces contenus; ne seront jamais univoques, transparents et insignifiants, parce qu’ils sont portés par des êtres humains, des sujets opaques et divisés.

dispositif de formation

La formation considérée comme un projet

La formation délibérément considérée comme un projet habité par des sujets et comportant deux visées contradictoires, antagonistes mais complémentaires; peut alors être conçue comme un complexe. C’est-à-dire qu’on se permet ici de faire le pari que pour comprendre cet objet. Au lieu de chercher à réduire l’objet pour le maîtriser, on aura le projet d’articuler les parties antagonistes et complémentaires que comporte le dispositif de formation. C’est donc bien le regard sur l’objet qui, complexe; privilégie le phénomène considéré comme un construit social et refuse de le traiter en fait naturel.

Le désarroi, des enseignants par exemple, dont on a fait des succès de librairie, prend un autre sens. Il n’est plus un avatar de l’histoire qui serait en décadence ou la conséquence d’une mauvaise formation. Il est bien davantage le reflet de personnes ayant à agir dans une situation comportant de l’incohérence. Alors que toute préparation a privilégié l’unité. Comment peut-on espérer assumer des situations de formation tant que la contradiction est prise, à l’évidence, pour un signe de la malformation ?

En effet, la formation pourrait assurer suffisamment les formateurs pour qu’ils puissent vivre des situations d’écartèlement; des situations d’alternative impossible, que certains continuent à appeler « paradoxes ». Non pas pour supprimer la souffrance qu’ils y accrochent. Mais, en atténuant cette souffrance qui vient d’abord chez eux d’une armature intellectuelle ne leur permettant pas d’évoluer dans un objet bifide; dont les parties sont conflictuelles. Il s’agit avant tout de promouvoir et de faciliter un travail sur soi; sur l’imaginaire toujours ambivalent pour pouvoir penser l’hétérogène.

Ce travail commencé dans la formation des formateurs est l’expression du processus de professionnalisation. Il leur permettrait d’assumer les antagonismes et de construire dans leur dispositif de formation de la pertinence aux pratiques sociales; au lieu de s’obnubiler sur la seule cohérence des actions.

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