Les origines des différences scolaires

L’analyse des origines des différences scolaires que nous proposons dans cet article permet à ceux qui désirent mettre en place une séquence de pédagogie différenciée; de choisir et surtout de combiner les éléments de façon riche et nuancée. Cette combinaison sera différente, bien sûr, selon les élèves. Et, surtout, plus ou moins complexe et intense selon le profil individuel de chacun.

L’appartenance socio-économique, une des origines des différences scolaires

Rapidement repérées dans une classe, les différences socioprofessionnelles des parents des élèves participent à la genèse de l’inégalité des niveaux scolaires des enfants. Comme le montraient les analyses de Beaudelot-Establet et de B. Charlot. Même si les travaux récents de psychologie sociale et de psychopédagogie nuancent ce constat en notant que cette influence se réduirait dans les petites classes. Et que d’autres paramètres d’ordre psycho-affectif surtout expliqueraient la variété des difficultés éprouvées par les élèves.

Jusqu’en 4e les réussites et les passages de classe des élèves ont tendance à se rapprocher selon les catégories socioprofessionnelles des parents. Mais il subsiste une forme de sélection par le jeu des redoublements. Les redoublements sont plus nombreux chez les enfants d’ouvriers créant une sur-représentation de ceux-ci dans le primaire. Et provoquant souvent un sentiment de dévalorisation et d’échec. Dans le secondaire, les différences s’accentuent. Ce constat de l’hétérogénéité de l’appartenance socioéconomique des élèves s’éclairera par l’analyse ultérieure d’autres éléments. A la fois du cadre de vie comme l’origine socioculturelle et des processus d’apprentissage, comme les stades de développement opératoire et l’âge des élèves.

Les différences socioculturelles

Plus ou moins prononcée selon l’implantation des établissements scolaires; l’hétérogénéité socioculturelle des élèves naît de leur origine et/ou de leur appartenance sociale. Elle conduit à l’hétérogénéité des résultats scolaires par le biais des différences du code culturel des élèves qui se cristallise autour de deux éléments : le langage et les valeurs.

Quelques remèdes possibles

Pour remédier aux inégalités scolaires engendrées ainsi par cette hétérogénéité socioculturelle, la pédagogie différenciée offre quelques réponses.

Cadres psycho-familiaux, origines des différences scolaires

Les cadres psycho-familiaux sont les systèmes d’organisation des familles pour éduquer leurs enfants. Pourquoi tenir ainsi compte des cadres psycho-familiaux dans cet inventaire de la différenciation ?

Le psychologue Jacques Lautrey, a dégagé le lien qu’il voit entre les processus de développement intellectuel des enfants et l’organisation de leur milieu familial. D’après lui, les différences de capacités intellectuelles ont pour origine les inégalités socio-économiques. Et le système éducatif familial serait une variable intermédiaire entre la classe sociale et le développement cognitif de l’enfant. Par des enquêtes auprès des familles, il constate que le cadre souple est le plus favorable au développement cognitif, et le cadre incohérent le pire.

Reprenant la théorie de Piaget sur le conflit cognitif; Lautrey infère qu’un environnement sera d’autant plus favorable au développement cognitif qu’il sera source de déséquilibres susceptibles de donner lieu à des compensations et donc à des constructions et qu’il offrira en même temps les conditions nécessaires aux rééquilibrations. C’est pourquoi le cadre souple devient le meilleur pour le développement opératoire des élèves. Donc de leurs capacités à comprendre, raisonner, apprendre.

La diversité des stratégies familiales origines des différences scolaires

Les élèves sont aussi hétérogènes par les stratégies que leurs familles adoptent, plus ou moins consciemment, pour leur avenir. Pour certains, l’emprise de l’image familiale et des stéréotypes véhiculés par leur milieu est telle qu’elle oriente leurs attitudes à l’égard de l’école et des matières enseignées. Engendrant rejets ou motivations, si bien que réussites et échecs sont aussi liés à la stratégie familiale. Cet élément est donc à cerner lors d’un diagnostic car, selon qu’une famille se préoccupe ou non de l’avenir de l’enfant. Selon qu’elle surestime ou sous-estime ses possibilités, l’élève désirera travailler ou sera découragé.

Il faut noter que la stratégie, démobilisatrice à l’extrême, consistant à dévaloriser l’enfant ou l’école; à évoquer un avenir sombre de chômage, est fréquente chez les parents de milieux défavorisés. Ayant eu, eux-mêmes, jadis, des expériences et des sentiments négatifs à l’école. Provoquant une image de soi infériorisée qu’ils projettent sur leurs enfants. Que de handicaps pour ces élèves!

La différenciation, lorsqu’elle porte sur les processus, permet parfois d’en tenir compte en rendant l’élève acteur de ses apprentissages et plus responsable. Comme dans la démarche d’autoévaluation formative. Il se prouve ainsi qu’il peut réussir et retrouve confiance en ses propres capacités. Mais cela reste une entreprise de longue haleine car les représentations mentales liées à la famille ont une grande puissance sur le psychisme des élèves adolescents.

La diversité des cadres scolaires

Parmi les origines des différences scolaires, la diversité des cadres scolaires, qui produit également des effets à plus ou moins long terme sur les résultats scolaires des élèves; intervient elle aussi; par le biais du croisement et de l’aggravation des aspects négatifs des trois facteurs suivants : l’implantation et les caractéristiques de l’établissement; le cadre de formation utilisé par les enseignants et le comportement des enseignants vis-à-vis des élèves.

L’influence de la prédiction

Des travaux canadiens, s’interrogeant sur cette influence de la prédiction, ont montré que lorsqu’un enseignant a un préjugé favorable sur un élève, il s’intéresse davantage à lui; s’en occupe plus. Et surtout le sollicite plus souvent de manière facilitatrice en posant des questions élucidantes et excusant même ses erreurs. Enfin, en ayant des comportements verbaux ou non verbaux (plaisanteries, sourires, clins d’œil, etc.) plus chaleureux qu’envers les autres élèves. Alors, par une interaction continue, l’élève éprouve le désir, d’une part, de se conformer à l’attente de cet enseignant. Et, d’autre part, d’explorer avec plaisir et d’agir avec énergie, se sentant encouragé à le faire car accepté même s’il se trompe.

A contrario, l’enseignant qui étiquette un élève comme mauvais, sera peu enclin à lui donner des signes de reconnaissance positifs. Il prédit qu’en retour de son enseignement, il recevra une image pas ou peu gratifiante. Cet élève, alors, sera conforté dans sa croyance d’être mauvais, plus ou moins intensément selon son passé scolaire et/ou familial. Si bien qu’elle inhibera ses désirs et la joie de la découverte en favorisant, au niveau psychologique, la passivité.

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